Comptes pour mineurs : Attention à la dématérialisation pour les plus jeunes

Tous les parents ne sont pas d'accord pour donner de l'argent de poche à leurs enfants ou en mesure de le faire. Faut-il donc suivre la tendance de l'époque qui est de donner de l'argent régulièrement à son enfant ?

Si oui :

> Combien convient-il de donner selon l'âge de l'enfant?

> Faut-il donner régulièrement?

> Peut-on suspendre les dons en cas de mauvais comportement ou faut-il les envisager comme une "obligation parentale"?

> Peut-on verser de l'argent sous une forme dématérialisée?

Tant de questions sans réponses nécessitant un éclairage.

Les années 60, période charnière

Les années 60, période clé de la croissance économique française, seront durant les trente glorieuses (jusqu'à 1973), l'occasion d'un nouveau rapport à l'argent. Les femmes pourront notamment se montrer autonomes en se passant de l'autorisation de leur mari pour ouvrir un compte bancaire (1965). Avec cette émancipation, et l'évolution de la place de l'enfant qui au fil des années sera de plus en plus entendu dans ses désirs, l'argent se démocratisera au sein des foyers.

Donner de l'argent à ses enfants, est donc une pratique relativement récente allant de pair avec une évolution de l'économie, mais aussi des moeurs, l'enfant étant désormais considéré.e comme une petite personne dont les désirs comptent.

Différence intergénérationnelle : L'enfant qui reçoit de l'argent ignore probablement aujourd'hui, que ses grands-parents n'ont jamais reçu d'argent de poche, et qu'il n'était pas courant que la génération de ses parents en reçoive. Les grands-parents disent d'ailleurs clairement qu'il ne leur serait jamais venu à l'esprit d'oser demander pareilles choses à leurs parents, et n'avoir pourtant manqué de rien. Ce petit rappel historique nous semble important pour éviter de corréler don d'argent et don d'amour (ou don de ce qui est nécessaire, indispensable)... : "Tu ne me donnes pas d'argent parce que tu ne m'aimes pas!"

Le don d'argent n'est pas une obligation

Car il est important de distinguer les besoins primaires (pyramide de Maslow), des besoins secondaires.

Le devoir des parents est de veiller à ce que les besoins primaires soient satisfaits sans conditions ou contreparties. Un parent se doit en effet de nourrir (physiologique) son enfant, de veiller à sa santé (physiologique), de lui procurer l'attention suffisante (estime) et lui consacrer du temps, afin qu'il ou elle prenne confiance et puisse atteindre ses objectifs (accomplissement)... Ces besoins peuvent ainsi se résumer en 5 points tels que l'a défini le psychologue américain Abraham MASLOW avec sa pyramide des besoins (1943) :

Pyramide de Maslow




Les parents qui ne sont pas en mesure de donner de l'argent de poche ne doivent donc pas se culpabiliser ou se considérer comme défaillants, quoi que puisse en dire leurs enfants, qui pourraient mettre en avant que leurs copain.e.s en reçoivent. Il s'agira de leur expliquer la raison pour laquelle on ne peut donner de l'argent, et de leur rappeler que l'essentiel reste de répondre aux besoins primaires précités qui sont les leurs.

Il conviendra également de leur rappeler qu'il y a suffisamment d'occasions de leur faire plaisir, notamment lors des fêtes marquantes que sont les anniversaires, Halloween, Noël, ou Pâques. Ces 3 ou 4 moments attendus avec excitation, seront aussi l'occasion de leur apprendre la patience et la compréhension du caractère exceptionnel d'un cadeau auquel s'ajoute une valeur sentimentale.

Des dons sous conditions...

Avec ces cadeaux "programmés", on entend souvent les parents dire : "Mais tu obtiendras ce cadeau à la condition que... comportement..." Car contrairement aux besoins primaires qui devraient être satisfaits sans conditions, les besoins secondaires que sont les cadeaux ou dons d'argent, sont peu ou prou soumis à conditions :

- que l'objet désiré (ou la somme désirée) par l'enfant entre dans le budget des parents;

- que l'enfant l'ait mérité (bon comportement, effort à l'école, etc);

- que les parents approuvent la nature du cadeau (on peut comprendre qu'un tatouage/piercing soit refusé, tout comme l'achat d'un animal domestique pour x raisons qui seront expliquées)...

D'un point de vue éducatif en effet, on peut comprendre qu'il serait catastrophique qu'un enfant ayant les pires comportements obtienne des cadeaux, les parents se sentant souvent obligés de répondre à la pression sociétale qui voudrait qu'un bon parent offre forcément les cadeaux demandés en période de fête. On parlerait en psychologie comportementale du renforcement positif d'un mauvais comportement (le R+ consiste à donner au sujet un stimulus agréable afin d'augmenter la fréquence d'apparition d'un comportement.) Autrement dit, l'enfant serait par ce cadeau ou don d'argent, encouragé (récompense) à maintenir ses mauvais comportements, et estimerait ce don comme un dû ne se mérite donc pas. Il n'aurait ainsi aucune raison de faire des efforts pour le mériter.

Article LezAPe sur le don d'argent aux enfants
Quelques conseils

> Suspendre les dons : On peut donc d'un point de vue éducatif, envisager de suspendre les dons d'argent ou de cadeau en cas de mauvais comportement, et appliquer ainsi une punition négative salutaire (Le P- consiste à supprimer un stimulus agréable pour l'enfant lorsque ce dernier fait preuve d'un mauvais comportement afin de diminuer/décourager ce comportement) sans se culpabiliser.

> A quel âge donner? A partir de 7-8 ans les enfants se montrent à l'aise avec les additions et soustractions. Ils.elles commencent à acquérir la notion des quantités et des proportions, et peuvent ainsi appréhender la valeur de l'argent en comparant les objets achetés entre eux. Il est raisonnable d'envisager alors de les aider à progresser en leur faisant don d'une petite somme à gérer. Généralement, l'enfant, fier.e, considère cette somme comme importante et ne la dilapide pas. En économisant, il.elle prendra conscience que les choses se méritent et qu'elles sont précieuses une fois acquises. Inversement, l'enfant pour qui l'on remplacera la tablette cassée immédiatement, peinera à faire cet apprentissage indispensable de la frustration et de la valeur des choses.

> Combien donner? La somme doit correspondre aux besoins de l'enfant selon son âge. De quoi peut-on avoir besoin à l'âge de 8 ans? (de bonbons, de BD, de cartes à collectionner...) Il s'agira donc de donner des montants permettant d'acheter ces choses. A 16 ans par contre, il sera plus question de donner des montants permettant de s'acheter des vêtements, d'aller au cinéma etc, tout en gardant un oeil éducatif sur l'usage qui est fait de cet argent.

> Donner régulièrement et à date fixe? De préférence oui, mais toujours sous conditions. Ce qui implique :

- que ce don n'est pas automatique;

- qu'il se mérite parce que l'argent a une valeur;

- que le parent souhaite faire plaisir à son enfant par ce biais, estimant que cette autonomie financière sera une aide supplémentaire à son épanouissement.

> Attention à la dématérialisation et au crédit automatique : L'épidémie de la COVID-19 a entraîné un changement des habitudes, et fait apparaître de nouveaux services proposant un versement d'argent de poche dématérialisé aux jeunes (comptes pour mineurs) via une application. Mais attention, lorsque l'enfant est jeune, il nous semble préférable de ne pas passer par ce type de paiement sur smartphone qui s'opère dans un monde qui reste "virtuel". Privilégier l'aspect palpable de la monnaie lui fera prendre davantage conscience qu'il s'agit bien d'un don qui n'a rien d'automatique et qui est lié à un mérite.

Rappel : Il s'agira néanmoins de répondre par ces dons à des besoins secondaires qui ne pourront jamais remplacer les besoins primaires que nous avons rappelés (pyramide de Maslow). Nous avons d'ailleurs tous entendu des récits où des enfants gâtés sur la plan matériel, affirmaient pourtant avoir été malheureux car ils manquaient d'attention, de considération, et d'amour.

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Jean-Luc ROBERT Psychologue à LezAPe
Psychologue spécialisé dans les Troubles du Spectre Autistique

Auteur du livre : Ma vérité sur l'autisme, Jean-Luc ROBERT, N° ADELI : 779301076, consacre essentiellement sa carrière à l'étude et au traitement des troubles du comportement des enfants, notamment des autistes.


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